Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

21 novembre 2008

DPI VOUS EN DIT PLUS ....N°9

Lettre 495 du 21 au 27 novembre 2008. Avec l'autorisation permanente de diffusion accordée à DPI par son auteur, le Sénateur Trégouët.


Pollution et réchauffement : un même combat

La lutte contre les émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique aura-t-elle, en améliorant la qualité de l’air, des effets bénéfiques pour la santé ? Oui, mais seulement si les deux politiques - lutte contre le réchauffement climatique et contre la pollution atmosphérique - sont pensées et menées conjointement. Dans le cas contraire, elles peuvent avoir des effets contradictoires, parfois au détriment de la santé des populations. Tel est en substance le message des experts réunis au Parlement européen de Strasbourg, jeudi 6 et vendredi 7 novembre, pour un colloque consacré à l’intégration de ces problématiques.

"Les deux questions ont jusqu’à présent été étudiées séparément, à des époques différentes, par des communautés scientifiques différentes, dans des cadres institutionnels différents", constate Jean-Marie Rambaud, vice-président de l’Association pour la prévention de la pollution atmosphérique (APPA), organisatrice de la réunion. "Nous avons besoin d’une approche globale, il n’y a qu’une seule atmosphère", a plaidé Roy Harrison, spécialiste de la santé environnementale à l’université de Birmingham (Grande-Bretagne).

Les deux types de pollution sont en effet étroitement liés. Elles proviennent à peu près des mêmes sources, à savoir la combustion de carburants fossiles, la production industrielle et la production agricole. De plus, les deux phénomènes interagissent. L’ozone, qui est un polluant nocif pour la santé, contribue à l’effet de serre, et les particules ont un impact sur le climat. Réciproquement, l’augmentation des températures accélère les réactions chimiques dans l’atmosphère et aggrave la pollution. Ces interactions sont encore trop peu étudiées, selon les participants.

Les avantages attendus d’une meilleure intégration des politiques sont de plusieurs ordres. Le bénéfice pourrait être économique et politique. L’objectif de réduire de 20 % les émissions de CO2 d’ici à 2020 en Europe contribuera à minorer les particules de 12 %, les oxydes d’azote de 15 %, et le dioxyde de soufre de 40 %, a expliqué Markus Amann au nom de l’International Institute for Applied Systems Analysis (IIASA). Le bénéfice économique lié aux maladies ainsi évitées pourrait atteindre 20 milliards d’euros par an. "Ce gain substantiel n’est jamais pris en compte dans les analyses des coûts et des bénéfices des politiques de lutte contre le changement climatique", regrette le chercheur. La mise en avant de ces bénéfices sur la santé pourrait aider à légitimer la lutte contre le changement climatique, surtout dans les pays en développement, où la pollution atmosphérique est perçue comme un enjeu majeur, à l’instar de la Chine.

Une élaboration conjointe permettrait surtout d’éviter les contradictions. Le chauffage au bois, par exemple, est une source d’énergie renouvelable promue dans le cadre de la lutte contre les émissions de CO2, mais aussi un gros émetteur de particules. "Nous avons vu arriver une nouvelle source de pollution dans nos villes, a relaté Ed Dearly, de l’association britannique Environnemental Protection UK. Si le chauffage au bois remplace des centrales à charbon en milieu rural, où la pollution atmosphérique est limitée, c’est positif. S’il remplace du chauffage au gaz naturel, moins polluant, dans les villes, c’est négatif."

Autre exemple : l’encouragement donné en France, par le bonus-malus, aux véhicules diesel, moins consommateurs de carburant donc moins émetteurs de CO2, mais eux aussi émetteurs de particules. Or l’installation de filtres à particules n’est pas obligatoire en Europe. Et la présence du filtre augmente la consommation du véhicule, annulant une partie de l’effet recherché.

Une vision d’ensemble inciterait à privilégier les mesures efficaces sur tous les tableaux : économies d’énergie, efficacité énergétique, développement des énergies solaires et éoliennes, choix du rail et des transports en commun au détriment de la route, etc. Elle permettrait, en outre, d’anticiper les effets d’interactions inattendues. Les émissions de particules, par exemple, semblent avoir retardé les effets du réchauffement climatique en réfléchissant le rayonnement solaire. Leur diminution dans l’atmosphère risque donc d’accélérer le phénomène. "Cela ne veut pas dire qu’il faut arrêter de lutter contre la pollution atmosphérique, relève M. Amann, mais qu’il faut faire encore plus, et plus vite, contre les émissions de gaz à effet de serre."

La forêt européenne, un précieux "puits de carbone"

Pour la première fois, la protection des forêts tropicales a été prise en compte, en décembre 2007, à Bali, où les Nations unies établissaient la "feuille de route" de l’après-Kyoto. Le massif forestier européen, lui, vient de tenir la vedette d’une conférence organisée à Nancy, du 6 au 8 novembre, par la présidence française de l’Union européenne (UE), dans le cadre des négociations sur le climat. L’enjeu, cette fois, étant moins de protéger les forêts que de mieux les gérer, et d’exploiter au mieux leurs capacités à constituer un "puits" de carbone. Car dans son ensemble, la forêt européenne se porte bien. Sa superficie (plus d’un milliard d’hectares, Russie comprise) s’est même accrue de 13 millions d’hectares - l’équivalent de la Grèce - au cours des quinze dernières années, du fait de l’extension des plantations et de son expansion naturelle sur d’anciens territoires agricoles.

Or le bois est constitué à 50 % de carbone. La forêt, par sa biomasse et plus encore par l’humus qui se forme dans son sol, constitue donc un piège naturel pour cet élément chimique. Un moyen de lutter contre les gaz à effet de serre qu’il ne faut pas négliger, les experts du Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ayant rendu, en 2007, un rapport inquiétant sur la vitesse à laquelle progressent les émissions de dioxyde de carbone (CO2).

Comme tous les végétaux, la forêt, grâce à la photosynthèse, puise du carbone dans l’atmosphère, qu’elle lui restitue par la respiration, la décomposition ou la combustion de sa biomasse. Lorsque ces échanges sont inégaux, la forêt constitue soit une source de carbone (elle en relâche plus qu’elle n’en capte), soit, à l’inverse, un puits de carbone. C’est ce dernier cas qui prévaut en Europe, où l’on estime que le puits forestier compense environ 15 % des émissions de carbone fossile.

Mais pour combien de temps ? "Si l’idée du puits de carbone forestier s’est développée du fait de l’augmentation de productivité observée dans de nombreuses forêts d’Europe et d’Amérique du Nord, cette tendance ne doit pas faire oublier l’importance des événements extrêmes", tempère Jean-Luc Peyron, directeur du groupement d’intérêt public Ecofor. Il rappelle qu’à la suite de la canicule de 2003, la productivité primaire brute a été réduite de 30 % à l’échelle de l’Europe par rapport à 2002. Les conditions climatiques ont alors annulé, par leur ampleur, l’équivalent de "quatre années de puits". Un phénomène exceptionnel qui pourrait devenir plus fréquent dans le cadre du changement climatique, laissant augurer une moindre efficacité du puits forestier.

Cette probable évolution pourra-t-elle être compensée, voire davantage, par des mesures de gestion appropriées ? Impact des coupes d’arbres dans un peuplement portugais d’eucalyptus, évolution des massifs finlandais selon différents scénarios, amélioration des modèles de simulation de la croissance forestière : les exemples cités lors de la conférence de Nancy témoignent du dynamisme des recherches menées pour évaluer le rôle des formations boisées sur le cycle du carbone, dans les conditions climatiques actuelles et à venir.

Côté terrain, quelques initiatives apparaissent également. Ainsi celle de l’association France Forêts, qui met en place une trentaine de sites forestiers pilotes, afin d’offrir aux professionnels des exemples de gestion permettant d’améliorer le bilan carbone et d’optimiser l’utilisation du bois. Pour l’heure, cependant, l’essentiel est ailleurs. Dans le protocole de Kyoto - dont les objectifs ne s’appliquent qu’à la période 2008-2012 -, les quelques paragraphes consacrés à la forêt sont le résultat d’une négociation ardue entre de multiples parties et intérêts, qui aboutit à des règles complexes et actuellement peu applicables. Les délégués des Etats membres de l’UE et des organisations internationales présents à Nancy en ont âprement discuté : pour préparer "l’après-2012" et mettre en oeuvre des projets concrets en matière de puits de carbone, il importe avant tout d’accélérer les négociations.

Promouvoir les espaces verts pour réduire les inégalités de santé

Des chercheurs de l’Université de Glasgow viennent de montrer que les inégalités de santé imputables à des différences de revenus sont plus faibles dans les zones où les espaces verts sont plus nombreux. Le détail de cette étude menée par Mitchell et collaborateurs vient d’être publiée dans la dernière livraison du Lancet.

« Les conséquences possibles de cette étude sont claires : les environnements qui favorisent une bonne santé pourraient être cruciaux dans la lutte pour la réduction des inégalités de santé », commentent les auteurs de l’étude. Mitchell et collaborateurs expliquent que l’effet positif des espaces verts (parcs, forêts, aires de jeux avec présence de végétation) peut s’expliquer par plusieurs facteurs : ils favorisent l’exercice physique mais peuvent aussi avoir une action positive sur l’état psychologique, la pression artérielle ou encore le niveau de stress.

Dans ce travail, les chercheurs ont étudié les données de près de 41 millions d’anglais avec notamment des chiffres de mortalité de 366348 personnes afin de savoir si l’association entre les revenus et la mortalité variait en fonction d’un environnement riche en espaces verts ou non.

Dans le cas de la mortalité totale, ils ont montré que les inégalités de santé entre les plus riches et les plus pauvres étaient deux fois plus faibles dans les endroits riches en espaces verts comparés aux zones qui en étaient le plus dépourvues. Cette différence était encore un peu plus marquée pour la mortalité par maladies circulatoires. Par contre, les auteurs n’ont pas trouvé d’effet significatif pour la mortalité dont les causes ne sont vraisemblablement pas affectées par un environnement vert telles que les cancers du poumon.

Dans un commentaire de cette étude, le Dr Terry Hartig de l’Université d’Uppsala en Suède estime que cette étude apporte « la preuve précieuse que les espaces verts font plus qu’embellir le voisinage ; il apparaît qu’ils ont des effets réels sur les inégalités de santé, d’une façon qui devrait être prise au sérieux par les politiques et les autorités de santé ».

Une installation pilote de recyclage de CO2 par les algues

Le 6 novembre 2008, le Ministre-Président de Rhénanie du Nord-Westphalie, Jürgen Rüttgers, a inauguré une installation de production d’algues près de la centrale électrique du groupe RWE à Bergheim-Niederaußem, permettant d’en absorber et filtrer le CO2 à l’aide de microalgues. Cette installation pilote, fruit d’une coopération entre le Centre de recherche de Jülich, l’entreprise RWE et l’Université Jacobs de Brème, réunit toutes les conditions optimales pour les algues.

"Ce projet montre que des centrales à charbon de haute efficacité et une protection innovante du climat ne sont pas forcément incompatibles", déclare Sebastian Schmidt, membre du comité directoire du Centre de recherche de Jülich. Dans cette installation d’environ 600 m2, les algues seront approvisionnées en CO2 directement par les gaz sortant de la centrale. Par rapport aux végétaux terrestres, les algues présente un taux de croissance sept à dix fois plus élevé et absorbent ainsi plus de CO2. La masse résultante fait l’objet de recherches, dans le but de la valoriser, pour du biogaz par exemple.

Les commentaires sont fermés.